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BIM GEM: état des lieux et mise en place

Comment assurer la continuité du BIM de la conception à la maintenance avec le BIM GEM ?

Si la numérisation du BTP n’est pas nouvelle, il y a encore des étapes à franchir pour assurer une continuité complète de l’information entre la phase de construction et d’exploitation. C’est dans ce contexte que le lien entre BIM construction et BIM GEM (Gestion Exploitation Maintenance) prend tout son sens.

Dans cette interview, Patrick Albertini, consultant métier chez Thinkproject France, nous apporte son éclairage sur l’importance de la continuité numérique du BIM.

En introduction, quelle est ta définition pratique des notions de BIM et de GEM ?

Le BIM (Building Information Modelling) intègre toute la documentation et l’information autour d’une infrastructure. Que cette information soit graphique, technique, administrative… Le BIM ne doit pas être limité à la maquette numérique, c’est avant tout la Gestion de l’Information du Bâtiment.

La GEM pour Gestion Exploitation Maintenance correspond dans la pratique à suivre toutes les demandes de modifications, les problèmes rencontrés en exploitation et les travaux neufs. Cela va d’une personne dans son bureau qui s’aperçoit que la vitre est fendue, à l’équipe de maintenance qui identifie des problèmes sur le réseau de chauffage, au propriétaire qui souhaite agrandir telle aile du bâtiment.

Comment sont transmises les informations entre les phases de construction et d’exploitation ?

Jusqu’à présent, il s’agit souvent de prendre les informations du DOE (Dossier des Ouvrages Exécutés), et d’en importer une partie dans les outils, en particulier la GMAO. Les équipes de maintenance vont récupérer les informations lors des opérations. Cependant, comme les plans sont souvent imprimés ou scannés, la traçabilité des modifications se perd et la mise à jour des informations n’est plus assurée.

En résumé, il y a dans ce scénario d’un côté le monde dynamique de la Gestion-Exploitation-Maintenance qui vit avec l’évolution de l’infrastructure, et de l’autre le monde statique des informations reçues lors de la livraison du DOE.

Le BIM apporte de nouvelles perspectives en phase de MCO. Il est produit par toutes les personnes ayant œuvré sur la conception et la construction du bâtiment. C’est une vraie mine d’information ! Il est évident que les acteurs impliqués en phase de maintenance peuvent bénéficier de cette information, si elle est à jour et exploitable. En phase de maintenance, le BIM peut ainsi apporter un écosystème qui permet de suivre les demandes de modifications et leurs impacts. L’objectif est d’assurer que le dynamisme du monde GEM soit aussi reporté sur le BIM.

Qu’est-ce qui permet cette bascule de silos d’informations entre construction et maintenance à une vision « BIM GEM » ?

C’est la popularisation des outils et la standardisation des formats d’échanges. Auparavant, les personnes qui souhaitaient accéder aux informations des maquettes numériques devaient utiliser des logiciels dédiés, souvent coûteux. En phase de construction, chaque spécialité utilisait ses propres logiciels, mais les équipes d’exploitation ne peuvent pas se former et recourir à la même gamme d’outils !

Avec les normes BIM, les standards comme le format IFC (Industry Foundation Classes) et les viewers gratuits, l’accès aux informations s’est démocratisé. Les gens et les outils peuvent « parler le même langage ». Il suffit à l’exploitant que ses logiciels puissent lire le format IFC pour mettre à profit les informations.

Quels sont les bénéfices apportés par le BIM GEM ?

Pour les équipes sur le terrain, il y a avant tout un gain pratique. Lors d’une intervention, le personnel a accès au plan et à toute l’information associée. La vue est holistique. Il n’est plus nécessaire de rechercher les autres documents à partir de la référence de l’équipement dans une armoire à plans.

C’est une nouvelle manière d’approcher la gestion de l’information. La navigation dans une maquette 3D assure aussi par exemple d’identifier l’environnement de l’équipement sur lequel intervenir. Y a-t-il des arrivées d’eau à proximité du défaut électrique repéré ?

On voit tout de suite les impacts possibles. C’est l’opposé de ce qui arrive parfois dans certains films catastrophe où les voyants s’allument pour signaler un problème mais personne n’a aucune idée de ce qu’il y a autour ! Avec le BIM GEM, pour chaque opération, on a accès à toute l’information, une vision de la localisation, et de l’environnement.

Cela ouvre aussi des portes sur l’estimation des coûts grâce aux simulations, et tous les autres bénéfices du BIM en phases de conception et de construction. Mais bien sûr tout cela sous-entend que l’on puisse exploiter vraiment le BIM en GEM !

Justement, que faut-il anticiper et quels sont les impératifs pour mettre en place cette démarche BIM GEM ?

La première chose à anticiper est la prise en compte des normes BIM lors de la livraison du DOE. Les documents et les informations ne doivent pas être livrés sous des formats propriétaires. Dans la majorité des cas, les personnes et les entreprises qui construisent ne sont pas celles qui exploitent. Le point commun c’est donc le client. C’est au maître d’ouvrage de prévoir ce passage de relais du BIM entre le constructeur et l’exploitant.

Le premier point est donc de prévoir des clauses de réversibilité afin de pouvoir récupérer l’exhaustivité de l’information de la construction et de la conception. Cela va aussi impacter la convention BIM qui doit intégrer les besoins de la future exploitation.

Le deuxième point qui est directement lié, c’est que les plans seuls ne suffisent pas ! Le DOE ne doit pas être limité aux plans finaux : les raisons des choix, la méthodologie, les exigences… sont aussi importantes. Lors des opérations de maintenance c’est l’analyse de l’ensemble des informations qui permet de prendre les bonnes décisions. C’est-à-dire toutes les données de la conception à la réalisation. Un des défis principaux est donc la difficulté de formaliser, dès le début du projet, les futurs besoins liés à l’exploitation de l’infrastructure !

Quelles sont les approches possibles du BIM GEM face à cette difficulté d’anticipation ?

Si la digitalisation de la phase de conception et de construction est mature, ce n’est pas le cas du pivot entre réalisation et exploitation. Cela va nécessiter des adaptations, des réflexions, une formalisation… Il faut bien considérer que nous sommes dans une période de transition ! Dans 10 ans, il y aura un cadre défini mais ce n’est pas encore le cas.

La première approche est d’avoir une clause de réversibilité et d’assurer que l’exploitant puisse extraire de l’EDC (Environnement de Données Commun) utilisé en phase de réalisation toutes les données du BIM pour les intégrer dans l’EDC GEM.

Je préconise cependant une deuxième approche qui renforce la continuité digitale entre réalisation et maintenance et apporte une réponse aux difficultés de formalisme dès le début du projet. Il s’agit de conserver l’EDC utilisé en phases amont aussi bien en termes de données que d’outil, pour la phase d’exploitation.

Cela implique que l’EDC soit ouvert et dispose de passerelles d’échanges pour, par exemple, pouvoir communiquer avec les outils de GMAO.

Il doit aussi être évolutif en matière de données, de paramétrage et de fonctionnalités afin de s’adapter à la philosophie du GEM. C’est la solution pour avoir une digitalisation complète des processus de modifications. Pour tout Ordre de Services dans la GMAO, la maquette va automatiquement changer.

Le BIM GEM est ainsi anticipé dès le départ, mais sans nécessité de formaliser dans le détail l’ensemble des futurs besoins liés à l’exploitation : le maitre d’ouvrage se donne la capacité d’être agile et de garantir la continuité de la chaine numérique durant tout le cycle de vie du bâtiment.

Nous avons plusieurs clients qui interviennent sur différentes phases du cycle de vie, que ce soit dans le BTP ou l’ingénierie. Suivant les projets, le besoin se limite à une phase ou peut toutes les inclure. L’outil doit donc pouvoir s’adapter à une vision de conception, de réalisation et d’exploitation.

Je suis en tout cas convaincu que la meilleure manière de faire face à cette période de transition, c’est d’être agile !

Quelles sont pour vous les prochaines étapes du BIM GEM ?

Comme je l’indiquais, cette charnière entre réalisation et maintenance va se formaliser dans les prochaines années, mais cela va prendre du temps. A plus court terme, c’est l’intégration de l’IoT et du BIM qui va prendre de l’ampleur. La connexion entre les capteurs et la maquette va renforcer la synchronisation en temps réel du BIM par rapport à la GEM, et son rôle de plateforme centrale de l’information. Un équipement déficient, et le capteur remonte directement l’information qui s’affiche dans la maquette. Les équipes de maintenance vont alors pouvoir intervenir en disposant de toutes les informations et les personnes concernées seront averties. Cela va accélérer énormément la prise en compte de l’information.

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